Ce titre a été choisi pour l’euphonie. Mais aussi pour son sens, comme on peut espérer que le lecteur en sera convaincu. Tout d’abord, la dame aux camélias et cette fin de quinquennat ont tous deux un côté poignant.
Faut-il que M. Sarkozy soit aux abois pour envisager de prendre le conseil d’un Claude Allègre sur l’école ! Par ailleurs, d’après mon dictionnaire, la traduction de « traviare » est « dévoyer, corrompre ». Or, après avoir fait changer de voie quelques « prises » en début de mandat, maintenant M. Sarkozy veut dévoyer quelques idées et déployer un rideau...de fumée devant son bilan.
Le fait principal est que « l’ordre » mondial est un immense déséquilibre. Les échanges économiques réels ne représentent que 2,7% des échanges financiers dans le monde. Une grande partie des 97,3% restants n’est que de la spéculation.Aussi, corriger ce déséquilibre, supprimer les paradis fiscaux, les rémunérations abusives aurait dû être le résultat des multiples réunions internationales qui ont eu lieu, dont celle du G 20, présidé par M. Sarkozy. Or le bilan est bien léger. Aussi, ne nous attardons pas sur la proposition de mettre en œuvre une taxation sur les transactions financières (taxe Tobin). La proposer à 100 jours des élections après que le Gouvernement se soit opposé en novembre dernier à un amendement socialiste proposant la mise en place d’une taxe de 0,05% sur les transactions financières apparaît comme une « acrobatie » pour reprendre le terme employé par Mme Lignières-Cassou.
Examiner les différentes mesures qui peuvent sortir notre pays et l’Europe du marasme est louable. Mais il faut être conscient qu’avec les avantages de chaque solution viennent souvent aussi des inconvénients. Ainsi, a été évoqué ici le scénario d’une dévaluation de l’euro. En un sens elle est déjà en marche puisque l’euro a baissé par rapport au dollar lors de ces derniers mois ; les prêts de la BCE aux banques qui prêtent aux états pourraient renforcer ce mouvement. Une dévaluation rend notre production plus compétitive (mais la brade aussi) et renchérit nos importations. Elle ne peut être décrétée par le Gouvernement.
La hausse, dite « sociale » de la TVA, va constituer la principale mesure du « sommet social » qui aura lieu lors de cette semaine. L’idée est en partie inspirée par le MEDEF et semble provenir de ceux qui pourfendent la mondialisation. Elle peut abonder de manière significative les caisses de l’état. Sur certains produits, elle pourrait être presque indolore : un prélèvement de 20 euros sur les petits téléviseurs et de 50 euros sur les écrans les plus grands n’aurait pas fait baisser la demande au moment du passage à la TNT (une occasion perdue, et un fait qui souligne la sortie de l’Europe en matière de hautes technologies). Elle peut avoir un effet notable sur l’emploi, le point le plus important de notre situation, en freinant les délocalisations. Mais compenserait-elle les différences de coût du travail entre notre pays et les pays émergents ? Aurait-elle un justificatif acceptable par nos partenaires et l’OMC ? De plus, à l’inverse d’une taxe écologique sur les transports de longue distance qui a été évoquée ici, elle ne peut prendre appui sur une indispensable lutte contre le réchauffement climatique. Une hausse de la TVA aurait un impact décisif sur la consommation et de ce fait irait à l’encontre d’un redressement économique. Si elle n’est pas répercutée sur les prix, elle est en contradiction avec la détaxation des heures supplémentaires qui est certes un avantage pour les employeurs, mais s’oppose à l’élargissement de l’emploi. Mais qui peut garantir que les consommateurs ne seront pas une nouvelle fois les perdants ? D’autant que les salaires et les pensions ne suivent pas l’inflation, en particulier dans la fonction publique. Aussi, seule une baisse corrélative de la TVA sur des produits de première nécessité pourrait faire accepter une hausse sur des biens moins indispensables. Avec la hausse de la TVA sur le livre et l’entretien des logements, on n’en prend pas le chemin.
Plutôt que d’alléger l’impôt sur les grandes fortunes, si l’on avait misé sur les investissements, l’innovation, l’amélioration de la qualité de nos exportations, nous n’en serions pas là. Un redressement ne sera pas facile. Mais il n’est pas hors d’atteinte.
- par Léon Valrasse
Pour une réflexion plus approfondie :
Joseph Stiglitz, Le triomphe de la cupidité, LLL (2010).
Daniel Cohen, La prospérité du vice. Une introduction (inquiète) à l’économie. Le Livre de Poche, Albin Michel (2009).