Trois chats nantis de Pau,
Dans la force de l’âge,
Convoitaient sans partage
Le même souriceau.

Le premier des rivaux,
Expert en brigandage,
Despote de passage,
Jamais ne disait mot.

Le second, le plus beau,
Brillait au bastingage ;
Son fier marivaudage
Vous caressait à chaud.

Notre ultime félin,
Greffière au doux pelage,
Cachait sous son corsage
Un appétit sans faim.

Donc nos trois chats, drapés
De vertu républicaine,
Voulaient tous trois croquer
Dame souris sans gêne.

Les crocs bien acérés,
Les griffes sous mitaine,
Comme croquemitaine,
Ils l’allaient dévorer.

« Halte, s’écria-t-elle.
S’il faut être mangé,
Forme il faut respecter
Et constitutionnelle :

Le peuple doit voter.
A l’issue du suffrage,
En guise de fromage,
L’élu m’ira croquer. »

Nos vominagrobis
Un temps se regardèrent.
C’est ainsi qu’ils lâchèrent
La finaude souris.

Un matou de gouttière,
Qui chassait au Hédas,
La saisit et croqua
Sans scrutin populaire.

Elus, gens désinvoltes,
Quand le peuple tenez,
Sachez le museler
De peur qu’il se révolte.

- par Christian Lemarcis